A ce jour, voici où en est Gondorla, ou la seconde nature :
Gondorla est une idée de papier. Elle n’a rien à dire sur le monde.
Dans Gondorla, les textes de fiction et les récits sont autant de panneaux peints, de mosaïques et de dallages imités qui se répondent sans ordre préalable. Ces éléments sans épaisseur composent des salles, des galeries, des escaliers et couloirs. Ils élèvent une construction disparate : Gondorla, ou la seconde nature.
Les scènes de genre s’y enchaînent par contiguïté (métonymie). Elles empruntent des formes aux contes, romans, journaux intimes, etc. Des maquettes s’assemblent où les personnages se développent sans idée de psychologie, d’apprentissage, d’arc narratif, ou de rédemption. Quand il intervient, le "Je" vise à l'impersonnel.
Sur les panneaux de Gondorla figurent des dessins au trait remplis de couleurs, des portraits en aplats, des silhouettes, des vues en trompe-l’oeil, ou la répétition de motifs géométriques, ou une simple texture. Son artisanat se nourrit d'analogies permutables.
Des dossiers de textes à venir ou non sont ouverts. La plupart restent des placards, des alcôves, des impasses. D’autres relèvent du domaine privé, inaccessible derrière la clôture. Tous étendent le périmètre de Gondorla qui cherche une respiration et une langue apaisées.
Dans la légende de Gondorla, une clairière non figurative et non écrite s'ouvre au milieu des éléments qui rendent visible la seconde nature. Ce lieu est sous le signe de l'agôn, qui est lutte de la vie comme combat et disparition.
Ordinairement, cet entre-textes est consacré à l'exercice avant l’agôn, et au repos après lui. Il offre sa solitude bienveillante à qui s'attarde et reprend des forces entre deux épreuves. Parfois il doit redevenir arène, car, perpétuellement, l’agôn se relance. Les combats sans mort ni blessure y durent alors tout le jour.
Bien sûr, à tout moment et comme toute forme de vie, Gondorla peut cesser son institution laborieuse. Son oubli s’accélérera. Mais la ruine n’affectera pas le geste mental de Gondorla : chaque élément de l’utopie, et le nom même de Gondorla, contient Gondorla tout entière (synecdoque). Le reste relève de l’impermanence, et de ma fin comme de celle de mon monde quand il allait sombrer.
De ce qui précède, je n'ai pas de preuve autre qu'une croyance qui ne passe pas.
Plus j’avance, plus cette esthétique obsessionnelle, inutile, m’est opaque. Plus ce que j’ai appris, ou cru, se délite. Je n'ai pas le fétichisme de ces motifs obscurs : ils ont vocation à s'abolir. Gondorla se gaspille, embrasse sa propre insignifiance, et la célèbre.
Ce qui subsiste pour l'instant est la typographie des éléments de Gondorla, ou ici simplement le défilement de leur code informatique avec une suite de 1 et de 0 : mon double numérique dans cette recherche, dont j'accepte l'échec quand le lambris pourrit et le papier-peint se déchire.
Je ris jaune et prends mes jambes à mon cou. Mon désir de Gondorla m'a claqué sa porte au nez, et j’ai perdu la clef. Je suis devant lui. Affranchi, il est désormais la Chose Gondorla, qui est sans idée du mal.
O. N.
Je n'ai pas compris un seul mot, il me faut une méthode facile, alternative : Gondorla Subliminal
P. S. : Et puis, comme tout le monde, Gondorla a ses hauts et ses bas. Elle a parfois envie de s'asseoir sur une chaise et de pleurer, sans que les larmes ne viennent.
D'autres jours, elle saute en l'air, et chante : sa vie est une comédie musicale où tout est joie.