Par exemple :
« La partie sud-ouest de Chypre recèle un nombre relativement élevé de piliers de pierre percés d’une sorte de fenêtre. (…) Il s’agit de montants de pressoirs (à huile) à levier :
l’extrémité d’un tronc d’arbre était encastrée dans la fenêtre. (…) En 1874, Palma di Cesnola attribua deux de ces monolithes à un temple d’Aphrodite. (…)
Toutes ces interprétations cultuelles étaient justifiées par le fait que ces monuments jouaient réellement un rôle religieux dans la société traditionnelle : des pouvoirs salutaires leur
étaient attribués. Des lampes étaient placées dans les niches, des monnaies déposées en offrandes ; des enfants malades étaient passés dans l’orifice de la pierre dans l’espoir d’obtenir
leur guérison et, à Anoyira, les femmes faisaient de même pour avoir des enfants. »
Jean-Pierre Brun, Le vin et l’huile dans la Méditerranée antique (2003), p. 219
« (…) quand on paye sept francs par jour, cela comprend tout sauf le droit de prendre les autres de haut. Mais il y a des gens, qui, moins ils payent, plus ils se prennent au
sérieux. Mes pensionnaires les plus difficiles ont toujours été ceux qui avaient les petites chambres. »
La Pension Beaurepas (1879), Henry James
De nos jours, la société qui fabrique le Lego met en avant des figurines sous licence qui évoquent le concurrent Playmobil. Les constructions, véhicules, etc. qui les accompagnent sont affligés de détails toujours plus minutieux, au risque du mièvre.
Naguère, et initialement, la beauté classique de Lego résidait dans son système, à la fois simple et riche de possibles combinaisons. C'était l'équivalent en plastique d'un jardin à la française et sa gamme restreinte d'éléments : peu de briques, couleurs primaires et noir et blanc.
Naturellement, ce formalisme sommaire laissait tout l'espace à l'imagination. Désormais, le prêt-à-rêver s'impose.
Par principe, Gondorla prolifère.
Dans un premier temps, elle stocke à la façon d'une retraitée de la Côte d'Azur (France) saisie d'une peur de manquer lors d'une crise internationale.
La panique passée, elle cultive son goût pour Georges Perec (1936-82) et ses Choses : Une histoire des années soixante, et ses listes.
Cette passion de l'entreposage a ses risques : ainsi en va-t-il des trésors que Henry James fait réunir par Mrs Gereth dans The Spoils of Poynton, (Les dépouilles de Poynton), (1897).
Un palais vénitien décrépit fait payer très cher ses charmes. Deux femmes le gardent; il est un coffre-fort formidable contre qui entend le dévaliser : The Aspern Papers (Les papiers de Jeffrey Aspern) (1888), Henry James.
Un emporium mortifère est aussi ravissement baroque dans la série photographique Hyper (2007-9) de Denis Darzacq.
Le facteur Cheval (1836-1924) passa trente-trois ans à Hauterives (Drôme) à charrier des cailloux pour édifier son Palais idéal.
Les façades du Palais, encyclopédiques, intègrent des Sources de Vie et de Sagesse ; des temples égyptien, indou ; des Géants (César, Vercingétorix, Archimède) ; une Tour de Barbarie ; quantité d’animaux ; des miniatures de chalet suisse, château fort, etc.
Faute d’autorisation à être inhumé dans son Palais, le facteur construisit ensuite en huit ans au cimetière communal son Tombeau du silence et du repos sans fin. Il avait quatre-vingt six ans quand il l’acheva.
Un parcours de golf évoque dans le Midi un paysage moquetté au vert inquiétant, un gazon sous perfusions d’arrosages et de pesticides, du carburant brûlé dans la lassitude de tontes perpétuelles. Ce lieu a la biodiversité d’une dalle de béton.
Son côté sympathique réside dans le racket d’une clientèle qui affiche son bel automne.
Par contraste avec cette antinature, le minigolf enchante. Il est une pure fermentation de l’esprit urbain, un monde de jeu miniature, un Legoland sportif transgénérationnel.
Comme l’amour ou Gondorla, il attire, même si sa mise en oeuvre n’est pas à la hauteur de sa promesse.
Terme que l’officier de marine et écrivain Pierre Loti (1850-1923) appliquait à sa maison natale à Rochefort, son "port immobile" qu'il avait aménagée avec salon turc ; chambres arabe, monacale, des momies ; mosquée ; pagode japonaise ; salles Renaissance, paysanne etc.
Ce décor était un support à sa rêverie et le cadre de mises en scène de sa vie, notamment lors de fêtes en costumes.
La maison est mitoyenne avec une nette tendance à la prolifération, à l'annexion de surfaces adjacentes.
Le quartier est si vieux que les rez-de-chaussée de jadis sont à présent un premier niveau de caves. On entre par ce qui était alors le premier étage. Depuis longtemps, le sol a été creusé davantage, d’abord en caves puis comme une autre maison invisible à l'œil du passant, ou des catacombes, des bunkers, des ateliers clandestins.
Gondorla s’organise de plus en plus selon le même principe : modestie des élévations apparentes, structures souterraines qui s'étendent au gré des besoins, sans être nécessairement privées de jour, car elles peuvent rattacher des immeubles ordinaires, qu'elle utilise tels quels ou encore en puits de lumière et colonnes d'aération, mais sans accès public propre, seulement des portes de sortie dérobées.
Pour ce qui est du décor et des revêtements de murs, les textes sont là sous forme de panneaux peints à fresque, de lambris, de placages, d’enduits communs, et de plus en plus de papiers-peints.
De même pour les sols.
Gondorla englobe les structures particulières des différents textes.
Gondorla pourrait être une succession de serres, ou un passage couvert à la mode du dix-neuvième siècle pour valoriser un coeur d’îlot avec des piliers et une couverture transparente.
Ou une villa avec parties d’habitation et d’exploitation, ou des thermes antiques complets avec palestre et bibliothèque.